Face à une crise écologique sans précédent, la préservation de la biodiversité est devenue une priorité mondiale. Pourtant, les financements publics et les initiatives de conservation peinent à couvrir les besoins estimés à 700 milliards de dollars par an (Paulson Institute, 2020). Pour combler ce déficit, un nouvel instrument financier émerge : le marché des crédits biodiversité.
Inspiré du marché du carbone, ce système permet aux entreprises et institutions d’acheter des unités représentant un gain écologique mesurable, comme la restauration d’une forêt ou la protection d’un écosystème. En théorie, il s’agit d’un levier innovant pour financer la transition écologique. Mais dans la pratique, ce marché soulève de nombreuses interrogations : peut-il réellement contribuer à la protection du vivant, ou risque-t-il de devenir un nouvel outil de greenwashing et de spéculation financière ?
Dans cet article, nous allons explorer le fonctionnement du marché des crédits biodiversité, ses acteurs clés, ainsi que les enjeux et controverses qui l’entourent. Faut-il voir dans cette initiative une avancée cruciale pour la nature ou une simple monétisation des écosystèmes au profit des investisseurs ? Décryptage.
Comprendre le Marché des Crédits Biodiversité
Qu’est-ce qu’un Crédit Biodiversité ?
Un crédit biodiversité est une unité mesurable qui représente un gain écologique réalisé grâce à un projet de conservation ou de restauration. Il peut s’agir, par exemple, de la reforestation d’une zone dégradée, de la restauration de milieux humides ou encore de la préservation d’un habitat menacé.
L’objectif est double :
- Financer des projets de protection de la biodiversité grâce à des investissements privés.
- Permettre aux entreprises et institutions d’améliorer leur empreinte environnementale en achetant des crédits biodiversité.
À la différence des crédits carbone, qui reposent sur une unité universelle (la tonne de CO₂ évitée ou captée), les crédits biodiversité sont plus complexes à quantifier, car ils concernent des écosystèmes variés, difficiles à standardiser. Cette particularité rend leur intégration dans un marché global plus délicate.
Pourquoi un Marché des Crédits Biodiversité ?
Un besoin urgent de financement
La biodiversité mondiale recule à un rythme alarmant. Selon l’IPBES (2019) :
- 75 % des surfaces terrestres sont altérées,
- 66 % des océans sont impactés,
- 85 % des zones humides ont disparu.
Pour tenter d’inverser cette tendance, l’accord de Kunming-Montréal (COP15, 2022) prévoit la mobilisation de 200 milliards de dollars par an d’ici 2030, dont 20 à 30 milliards doivent provenir des pays développés pour soutenir les pays en développement. Le marché des crédits biodiversité est l’une des solutions envisagées pour atteindre ces objectifs.
Un modèle inspiré du marché du carbone
Le marché des crédits biodiversité s’inspire du marché du carbone volontaire (VCM – Voluntary Carbon Market), qui permet aux entreprises de compenser leurs émissions de CO₂. En 2022, ce marché représentait 1,9 milliard de dollars, avec 353 millions de tonnes de CO₂ compensées (Forest Trends, 2023).

L’idée est donc de transposer ce modèle à la biodiversité :
- Les entreprises et institutions achètent des crédits pour financer des projets de restauration.
- Les porteurs de projets vendent ces crédits pour obtenir des financements.
- Des standards et certifications garantissent la qualité et l’impact des actions financées.
Cependant, contrairement au marché du carbone, il n’existe pas encore de méthode universelle pour quantifier et comparer les crédits biodiversité, ce qui pose des défis en matière de transparence et d’efficacité.
Acteurs et structuration du marché

Qui investit dans les crédits biodiversité ?
Les principaux acheteurs de crédits biodiversité sont :
- Les grandes entreprises des secteurs à fort impact environnemental (agro-industrie, luxe, tech) qui cherchent à réduire leur empreinte écologique.
- Les institutions financières souhaitant diversifier leurs portefeuilles avec des actifs durables.
- Les États et collectivités locales, qui peuvent intégrer ces crédits dans leurs stratégies de conservation.
Selon Philippe Zaouati (Mirova), les entreprises investissent en fonction de leur secteur d’activité et de leur capacité à modifier leur impact écologique :
Secteur | Prédisposition à investir | Motivation principale |
---|---|---|
Agro-industrie | Faible | Peu d’alternatives à leur modèle productif, solutions coûteuses. |
Luxe | Élevée | Volonté d’améliorer leur image et transformer leurs chaînes d’approvisionnement. |
Tech | Très élevée | Peu d’alternatives à leur modèle, budgets importants pour compenser. |
Les organismes qui structurent le marché
Plusieurs acteurs travaillent à encadrer et structurer le marché :
- Biodiversity Credit Alliance (BCA) et Coalition for Private Investment in Conservation (CPIC), qui élaborent des standards de qualité.
- International Advisory Panel on Biodiversity Credits (IAPB), co-piloté par la France et le Royaume-Uni, qui propose des principes de gouvernance.
- Initiatives gouvernementales comme le Nature Repair Market (Australie) et le Biodiversity Credit System (Nouvelle-Zélande).
- Standards et certifications : Verra, Plan Vivo, Cercarbono, Wallacea Trust, qui développent des méthodologies de quantification.
Comment fonctionne l’échange des crédits biodiversité ?
Le cycle de vie d’un crédit biodiversité
Le marché des crédits biodiversité repose sur plusieurs étapes clés :

- Identification du projet : Restauration d’un écosystème, reforestation, protection d’espèces menacées.
- Mesure de l’impact écologique : Évaluation selon des méthodologies spécifiques.
- Certification : Validation par un organisme indépendant.
- Vente des crédits : Les crédits sont mis sur le marché et achetés par des entreprises ou investisseurs.
- Suivi et vérification : Contrôle régulier pour s’assurer que les objectifs écologiques sont atteints.
Exemples de transactions récentes
- SwedBank a acheté des crédits pour 13 hectares de renaturation en 2023.
- Terrasos (Colombie) propose des crédits à 29,5 €/10m² pour 30 ans.
- Savimbo vend des crédits à 5 $/ha pour 2 mois.
Ces premières transactions montrent l’intérêt croissant du secteur privé, mais aussi la diversité des prix et des méthodologies, ce qui souligne la nécessité d’un cadre réglementaire clair.
Le marché des crédits biodiversité se positionne comme un nouvel outil de financement pour la préservation des écosystèmes. Il attire un nombre croissant d’acteurs, des grandes entreprises aux États, en passant par les institutions financières. Cependant, le manque de standardisation et les risques de dérives spéculatives pourraient freiner son développement.
Dans la prochaine partie, nous verrons en détail les défis et controverses que soulève ce marché, notamment les risques de greenwashing, de spéculation et d’absence de gouvernance claire.
Les Acteurs et Mécanismes du Marché des Crédits Biodiversité
Alors que le marché des crédits biodiversité commence à se structurer, il attire un large éventail d’acteurs, des gouvernements aux entreprises privées, en passant par les ONG et les institutions financières. Cependant, son fonctionnement reste encore en phase d’expérimentation, avec des mécanismes d’échange qui varient selon les projets et les standards en place.
Dans cette section, nous allons explorer qui investit dans ce marché, pourquoi et comment les échanges de crédits biodiversité fonctionnent.
Qui Investit et Pourquoi ?
Les entreprises : entre engagement et pression réglementaire
Les entreprises sont les premières à s’intéresser aux crédits biodiversité. Trois motivations principales expliquent leur engagement :
- Réduire leur impact environnemental et améliorer leur image de marque.
- Anticiper les futures réglementations sur la biodiversité, notamment en Europe.
- Créer de nouveaux produits et services liés à la finance verte.
Mais toutes les entreprises ne sont pas concernées au même niveau.
Secteur | Exemple d’entreprises impliquées | Motivation principale |
---|---|---|
Agro-industrie | Nestlé, Danone | Impacts forts sur la biodiversité, intérêt limité car solutions internes possibles (agroécologie). |
Luxe | LVMH, Kering | Fort investissement dans l’éthique environnementale et l’image de marque. |
Technologie | Google, Microsoft | Peu d’alternatives pour compenser leurs impacts écologiques, budget conséquent pour financer des crédits. |
Les entreprises pionnières
Certaines entreprises ont déjà franchi le pas.
- SwedBank a acheté des crédits biodiversité pour 13 hectares de renaturation en 2023.
- LVMH a lancé des initiatives pour financer des projets de préservation via le marché des crédits.
Ces premiers engagements montrent que le marché attire surtout les grandes entreprises soumises à une forte pression sociale et réglementaire.
Les institutions financières : un marché d’investissement en devenir
Les banques, fonds d’investissement et assureurs voient dans les crédits biodiversité un nouvel actif financier durable.
- Le marché pourrait atteindre 69 milliards $ en 2050 selon le Forum Économique Mondial.
- Les crédits biodiversité s’intègrent dans des portefeuilles d’investissement ESG (Environnement, Social, Gouvernance).
Cependant, les financiers restent prudents face aux risques de manque de standardisation et de greenwashing.
Les gouvernements et institutions internationales
Les États jouent un rôle clé dans la structuration du marché.
- France et Royaume-Uni : co-pilotent l’International Advisory Panel on Biodiversity Credits (IAPB).
- Australie et Nouvelle-Zélande : développement de marchés nationaux des crédits biodiversité.
- Union Européenne : intégration progressive dans la réglementation ESG et la CSRD (Corporate Sustainability Reporting Directive).
Ces initiatives visent à encadrer un marché qui pourrait devenir un levier majeur du financement de la conservation.
Comment Fonctionne l’Échange des Crédits ?
Les étapes du cycle de vie d’un crédit biodiversité
Le marché repose sur un processus en plusieurs étapes, de la création d’un projet à la vente des crédits :
- Sélection du projet : Restauration d’un habitat, conservation d’une espèce menacée, etc.
- Évaluation scientifique : Mesure des bénéfices écologiques attendus.
- Certification : Vérification par un organisme indépendant.
- Émission des crédits : Les crédits biodiversité sont mis en vente.
- Achat par une entreprise ou un investisseur : Compensation volontaire ou engagement ESG.
- Suivi et validation : Audit des résultats sur plusieurs années.
Les standards et méthodologies en place
Contrairement aux crédits carbone, il n’existe pas encore de standard unique et universel pour les crédits biodiversité. Plusieurs méthodologies sont en cours de développement :
Standard | Pays d’origine | Spécificités |
---|---|---|
Verra | États-Unis | Standard carbone bien établi, développement d’un cadre biodiversité. |
Plan Vivo | Royaume-Uni | Approche centrée sur les écosystèmes et les communautés locales. |
Terrasos | Colombie | Intègre des critères écologiques et sociaux dans l’évaluation. |
Organisation for Biodiversity Certificates | France | Développé avec Carbone 4 et le Muséum National d’Histoire Naturelle. |
Chacun de ces standards propose une méthode différente pour quantifier et valider les crédits biodiversité, ce qui complique la comparaison entre projets.
Les plateformes et marchés d’échange
Les crédits biodiversité peuvent être échangés sur différentes plateformes :
- Marchés réglementés : Initiatives gouvernementales (Australie, Nouvelle-Zélande).
- Marchés volontaires : Plateformes privées où entreprises et investisseurs achètent librement des crédits.
Exemples :
- Terrasos vend des crédits à 29,5 €/10m² sur 30 ans.
- Savimbo propose des crédits à 5 $/ha pour 2 mois.
Cependant, le marché reste encore fragmenté, avec des prix et méthodologies très variables.
Le marché des crédits biodiversité est encore en construction, mais il attire déjà des acteurs majeurs, des entreprises aux gouvernements en passant par les institutions financières. Les mécanismes d’échange restent hétérogènes, avec des prix, des standards et des plateformes qui varient fortement.
Dans la prochaine section, nous verrons les principaux défis et controverses qui entourent ce marché : risques de greenwashing, spéculation financière et manque de transparence.
Défis et Controverses autour du Marché des Crédits Biodiversité
Le marché des crédits biodiversité est prometteur, mais il soulève également de nombreuses interrogations et critiques. Manque de transparence, risques de greenwashing, spéculation financière, ou encore absence de réglementation stricte sont autant de défis qui pourraient compromettre sa crédibilité et son efficacité.
Dans cette section, nous allons analyser les principaux risques associés à ce marché émergent et les questions qui restent en suspens.
Un Risque de Greenwashing ?
Une compensation sans réelle réduction des impacts ?
L’un des principaux reproches faits aux crédits biodiversité est qu’ils pourraient détourner l’attention des mesures de réduction des impacts écologiques. Certaines entreprises pourraient utiliser ces crédits comme un permis de polluer, sans changer leurs pratiques.
Exemple : Une entreprise agroalimentaire pourrait acheter des crédits biodiversité pour financer la restauration d’une forêt, tout en continuant à pratiquer la déforestation intensive ailleurs.
Dans le cadre du marché carbone volontaire, des études ont révélé que plus de 90 % des crédits carbone de certaines organisations n’avaient aucun impact réel sur la réduction des émissions (The Guardian, 2023). Le marché des crédits biodiversité pourrait-il connaître les mêmes dérives ?
Un manque de standardisation et de transparence
Contrairement aux crédits carbone, il n’existe pas encore de méthodologie universelle pour mesurer et comparer les crédits biodiversité.
- Chaque standard (Verra, Plan Vivo, Terrasos, etc.) applique ses propres critères d’évaluation.
- Les méthodologies sont souvent complexes et difficilement comparables.
Cette absence de cadre global accroît le risque de crédits « fantômes », c’est-à-dire des crédits qui n’ont en réalité aucun impact mesurable sur la biodiversité.
Des crédits basés sur des « impacts évités » ?
Autre point de controverse : certains crédits biodiversité sont basés sur des impacts évités plutôt que sur des gains réels.
- Plutôt que de restaurer un écosystème détruit, certains projets consistent à protéger une zone déjà intacte, ce qui n’entraîne aucun bénéfice net pour la biodiversité.
- Le Plan de Libreville (2023) propose par exemple de rémunérer certains États forestiers non pour restaurer, mais pour conserver leurs forêts, ce qui soulève la question de l’additionnalité (le crédit doit-il refléter un bénéfice concret et nouveau ?).
Spéculation et Opportunisme Financier
Le risque d’un marché purement spéculatif
Si le marché des crédits biodiversité prend de l’ampleur, il pourrait devenir un produit financier comme un autre, avec des investisseurs cherchant avant tout un rendement économique, plutôt qu’un réel impact environnemental.
Le marché du carbone en exemple :
- Entre 2021 et 2022, le prix des crédits carbone a connu des variations extrêmes (+900 % en un an en Europe).
- En 2023, le marché du carbone volontaire a chuté de 13 %, après des révélations sur des crédits fictifs.
Le marché des crédits biodiversité pourrait suivre la même trajectoire :
- Hausse des prix et spéculation, favorisant les grandes institutions financières plutôt que les acteurs locaux.
- Accumulation de crédits par des fonds d’investissement, qui les revendront plus tard à prix fort, sans impact réel.
- Projets de faible intégrité, financés uniquement pour générer du profit à court terme.
Qui profite réellement des crédits biodiversité ?
Le marché pourrait favoriser les grandes entreprises et les pays riches, au détriment des communautés locales.
- Les peuples autochtones et les ONG locales risquent d’être marginalisés, alors qu’ils jouent un rôle clé dans la protection de la biodiversité.
- Des entreprises polluantes pourraient acheter des crédits en masse, sans modifier leur empreinte écologique.
Exemple : Une société minière pourrait financer un projet de restauration en Amazonie, tout en détruisant un autre écosystème ailleurs.
Gouvernance et Transparence : Qui Contrôle ?
Un marché sans régulation stricte
Aujourd’hui, aucun organisme international ne régule de manière stricte le marché des crédits biodiversité.
- La COP15 a reconnu leur potentiel, mais sans cadre juridique contraignant.
- Les États développent leurs propres réglementations (Australie, Nouvelle-Zélande, UE), mais sans harmonisation globale.
Sans contrôle clair, ce marché pourrait devenir une jungle où chaque acteur applique ses propres règles.
Le défi de la traçabilité des crédits
Un crédit biodiversité doit garantir un impact mesurable et durable. Or, plusieurs questions restent en suspens :
- Comment s’assurer que le projet financé apporte bien un bénéfice net ?
- Comment éviter que les mêmes actions soient comptabilisées plusieurs fois (double comptage) ?
- Qui certifie la validité des crédits sur le long terme ?
Des initiatives tentent d’apporter des réponses :
- Le Panel International sur les Crédits Biodiversité (IAPB) cherche à établir des règles communes.
- Verra et Plan Vivo développent des standards plus stricts.
- Les banques et investisseurs demandent des garanties de transparence.
Mais pour l’instant, ces efforts restent fragmentés et insuffisants pour éviter les abus.
Le marché des crédits biodiversité repose sur une idée prometteuse, mais il est encore fragile et exposé à de nombreux risques :
- Le greenwashing : Les crédits pourraient être utilisés comme un simple outil de communication.
- La spéculation : Sans cadre strict, ce marché pourrait devenir un instrument financier sans lien avec la protection réelle des écosystèmes.
- Le manque de gouvernance : L’absence de standardisation et de régulation crée une forte incertitude.
Ce marché doit donc évoluer rapidement vers plus de transparence et de contrôle. La question clé reste : ce modèle peut-il réellement sauver la biodiversité ou deviendra-t-il une nouvelle bulle financière verte ?
Dans la prochaine partie, nous verrons les perspectives et évolutions possibles du marché, ainsi que les scénarios envisagés d’ici 2030 et 2050.
Perspectives et Évolution du Marché des Crédits Biodiversité
Le marché des crédits biodiversité en est encore à ses débuts, mais il pourrait rapidement devenir un levier majeur du financement de la conservation. Entre ambition écologique et dérives potentielles, son avenir dépendra de plusieurs facteurs : la structuration d’un cadre réglementaire, l’implication des acteurs publics et privés, et la capacité à garantir l’intégrité des crédits échangés.
Dans cette section, nous allons explorer les scénarios de développement du marché, les régulations attendues et les innovations qui pourraient structurer son évolution d’ici 2030 et 2050.
Projections Économiques et Croissance Potentielle
Quelle taille pour le marché des crédits biodiversité ?
Selon le Forum Économique Mondial (2023), plusieurs scénarios sont envisageables en fonction de l’évolution de la demande et du cadre réglementaire.
Scénario | Estimation du marché en 2030 | Estimation du marché en 2050 |
---|---|---|
Développement limité | 1 milliard $ | 6 milliards $ |
Développement efficace | 2 milliards $ | 69 milliards $ |
Transformation profonde | 7 milliards $ | 180 milliards $ |
À titre de comparaison, le marché du carbone volontaire était estimé à 1,9 milliard $ en 2022, avec une prévision de 50 milliards $ d’ici 2030.
Facteurs de croissance du marché
Le marché des crédits biodiversité pourrait connaître une accélération significative sous l’effet de plusieurs dynamiques
- Pression réglementaire croissante : Intégration progressive dans les normes environnementales et financières (UE, COP16).
- Demande accrue des entreprises : Pour répondre aux exigences ESG et améliorer leur image.
- Standardisation des méthodologies : Création d’outils de mesure fiables et acceptés à l’échelle mondiale.
- Digitalisation et blockchain : Amélioration de la transparence et de la traçabilité des crédits biodiversité.
Quelle Place pour la Réglementation ?
Vers un encadrement international ?
Aujourd’hui, il n’existe pas encore de cadre réglementaire mondial pour les crédits biodiversité, ce qui laisse place à une grande diversité d’approches et de méthodologies. Cependant, plusieurs initiatives visent à structurer ce marché :
- COP16 (Colombie, octobre 2024) : Présentation des recommandations de l’International Advisory Panel on Biodiversity Credits (IAPB).
- Union Européenne : Intégration progressive des crédits biodiversité dans le CSRD (Corporate Sustainability Reporting Directive) et la taxonomie verte.
- Australie & Nouvelle-Zélande : Mise en place de marchés nationaux de crédits biodiversité.
L’enjeu clé sera d’harmoniser ces initiatives pour éviter un marché fragmenté et favoriser la transparence.
Le rôle des États et des institutions publiques
Les gouvernements et institutions internationales ont un rôle clé à jouer pour structurer un marché éthique et efficace. Parmi les pistes envisagées :
- Fixer des standards minimums pour éviter le greenwashing.
- Encadrer la spéculation pour éviter les dérives observées sur le marché du carbone.
- Imposer des audits et des contrôles indépendants pour vérifier l’impact des crédits.
- Créer un registre mondial des crédits biodiversité pour assurer leur traçabilité.
Sans ces mesures, le marché pourrait être discrédité avant même d’atteindre sa maturité.
Innovations et Nouveaux Modèles Émergents
L’intégration des Crédits Biodiversité dans la Finance Durable
Les crédits biodiversité pourraient s’intégrer progressivement dans les marchés financiers, à travers :
- Les fonds d’investissement ESG, qui pourraient inclure des crédits biodiversité dans leurs portefeuilles.
- Les obligations vertes (« green bonds »), associées à des projets de restauration.
- De nouveaux indices financiers, mesurant l’impact des entreprises sur la biodiversité.
Les institutions financières devront cependant garantir que ces instruments aient un réel impact écologique et ne soient pas uniquement des outils de communication.
L’essor des technologies pour plus de transparence
L’un des grands défis du marché est la vérification et la traçabilité des crédits biodiversité. Des solutions technologiques émergent pour répondre à ces enjeux :
- Blockchain et smart contracts : Assurer une traçabilité infalsifiable des crédits.
- Imagerie satellite et IA : Suivi en temps réel des projets financés par les crédits.
- Tokenisation des crédits : Création d’actifs numériques échangeables sur les marchés financiers.
Ces innovations pourraient renforcer la confiance des investisseurs et améliorer la transparence du marché.
Scénarios d’Évolution du Marché d’ici 2050
Trois scénarios possibles pour l’avenir du marché des crédits biodiversité :
Scénario | Développement du marché | Conséquences |
---|---|---|
Scénario optimiste | Réglementation stricte, standards unifiés, adoption massive. | Financement massif de la biodiversité, gains écologiques réels. |
Scénario intermédiaire | Marché fragmenté, progrès mais dérives persistantes. | Impact limité, critiques sur le greenwashing. |
Scénario pessimiste | Spéculation, dérives incontrôlées, effondrement du marché. | Perte de crédibilité, abandon du concept. |
L’avenir du marché dépendra des choix faits aujourd’hui par les gouvernements, les entreprises et les institutions financières.
Le marché des crédits biodiversité a un fort potentiel, mais son succès dépendra de sa structuration. Pour garantir un impact écologique réel, il devra :
- Éviter les dérives spéculatives et le greenwashing.
- S’appuyer sur des méthodologies robustes et transparentes.
- Être encadré par des régulations claires et internationales.
- Utiliser les innovations technologiques pour garantir la traçabilité des crédits.
Si ces défis sont relevés, ce marché pourrait devenir un outil puissant pour la protection et la restauration des écosystèmes mondiaux. Sinon, il risque de reproduire les erreurs du marché carbone et de perdre toute crédibilité avant même d’avoir atteint sa pleine maturité.
L’enjeu est de taille : financer la préservation de la biodiversité sans en faire une simple marchandise.
Un Marché à Structurer pour Sauver la Biodiversité
Le marché des crédits biodiversité est une idée ambitieuse qui pourrait révolutionner le financement de la conservation. À une époque où les financements publics sont insuffisants pour restaurer les écosystèmes endommagés, ce nouvel instrument financier offre une opportunité unique d’impliquer les entreprises et les investisseurs privés dans la protection du vivant.
- Un potentiel immense : Si correctement structuré, ce marché pourrait générer jusqu’à 180 milliards de dollars d’ici 2050, selon le Forum Économique Mondial.
- Un modèle inspiré du carbone : Comme le marché du carbone, il vise à financer la compensation des impacts environnementaux.
- Une dynamique réglementaire en cours : Des initiatives comme l’International Advisory Panel on Biodiversity Credits (IAPB) et la COP16 cherchent à poser des bases solides.
Cependant, de nombreux défis restent à relever :
- Le greenwashing : Certaines entreprises pourraient acheter des crédits sans réellement réduire leur impact écologique.
- Le risque spéculatif : Sans cadre strict, le marché pourrait devenir un outil financier déconnecté de la réalité écologique.
- Le manque de régulation : Actuellement, aucun standard unique ne garantit l’intégrité et l’efficacité des crédits biodiversité.
L’avenir de ce marché repose donc sur trois piliers essentiels :
- Une réglementation forte et harmonisée, pour éviter la spéculation et garantir un véritable impact.
- Des méthodologies robustes et transparentes, pour mesurer l’efficacité des projets financés.
- L’implication des acteurs publics et privés, pour assurer un financement massif mais éthique.
Vers un Marché Responsable et Efficace ?
Si ces défis sont surmontés, le marché des crédits biodiversité pourrait devenir un levier puissant pour restaurer les écosystèmes mondiaux. Mais sans vigilance, il risque de reproduire les erreurs du marché carbone et perdre toute crédibilité.
Alors, opportunité écologique ou simple financiarisation de la nature ? La réponse dépendra des choix faits aujourd’hui par les gouvernements, les entreprises et la société civile.
La biodiversité ne peut pas attendre. Il est temps d’agir. 🌍🌱
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