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Mathieu Pesin
Consultant Performance Durable

Illustration en aquarelle représentant un avenir durable avec des formes géométriques et des éléments naturels dans un paysage urbain.

Crédits biodiversité : Une solution innovante pour préserver la nature et renforcer la performance durable ?

Introduction

Face à la crise environnementale actuelle, la biodiversité se trouve en première ligne. La perte d’espèces et la dégradation des écosystèmes menacent non seulement l’équilibre naturel, mais aussi les fondements mêmes de nos sociétés. Préserver la biodiversité n’est plus seulement une question de protection de la nature, c’est une urgence mondiale.

Dans ce contexte, de nouvelles solutions émergent pour réconcilier développement économique et préservation des écosystèmes. Parmi elles, les crédits biodiversité représentent une voie prometteuse. Ces crédits, bien que moins connus que les crédits carbone, sont un mécanisme clé pour financer des projets qui protègent, restaurent ou améliorent la biodiversité. Contrairement aux compensations traditionnelles, ils visent à générer un impact net positif sur la nature, sans compenser directement des dommages environnementaux ailleurs.

Alors que de plus en plus d’entreprises et de gouvernements s’engagent vers des objectifs « nature-positive » d’ici 2030, les marchés volontaires des crédits biodiversité se développent à une vitesse fulgurante. Mais comment ces marchés fonctionnent-ils réellement ? Qui sont les principaux acteurs ? Quels sont les défis et opportunités qu’ils présentent pour assurer leur succès à long terme ? Cet article vous propose un tour d’horizon des dynamiques actuelles, tout en explorant les perspectives d’avenir de cette initiative ambitieuse.

Le marché des crédits biodiversité : état des lieux

Croissance et dynamique du marché depuis 2020

Depuis 2020, les marchés volontaires des crédits biodiversité connaissent une montée en puissance rapide. La prise de conscience croissante de la crise de la biodiversité et l’adoption d’objectifs environnementaux ambitieux par la communauté internationale, comme le Kunming-Montreal Global Biodiversity Framework, ont favorisé ce développement. Ce cadre mondial vise, entre autres, à restaurer 30 % des terres et des océans dégradés d’ici 2030 et à augmenter les financements pour la préservation de la nature.

Dans ce contexte, les crédits biodiversité permettent de soutenir ces objectifs en finançant des projets de préservation et de restauration. Ces marchés, encore jeunes, se structurent principalement autour de solutions basées sur la nature, avec un fort intérêt de la part des secteurs public et privé. Leur potentiel à contribuer de manière significative à la transition vers un monde « nature-positive » suscite un engouement croissant.

Les transactions actuelles et projections futures

Malgré leur jeunesse, ces marchés ont déjà enregistré des transactions notables. À ce jour, il est estimé que la vente de crédits biodiversité a généré entre 325 000 et 1,87 million de dollars, finançant ainsi des projets couvrant entre 26 000 et 125 000 hectares de terres. Ces crédits se sont majoritairement échangés à des prix inférieurs à 25 dollars l’unité, bien que certains projets, notamment ceux impliquant des communautés locales ou des peuples autochtones, aient pu bénéficier de primes allant jusqu’à 300 %.

Les perspectives pour les cinq prochaines années sont particulièrement prometteuses. La majorité des acteurs du marché prévoient une augmentation substantielle des transactions, avec des attentes de ventes dépassant les 100 000 crédits biodiversité dans certains cas. Cette dynamique laisse penser que le marché des crédits biodiversité pourrait suivre un chemin similaire à celui des marchés du carbone, qui ont mis plusieurs décennies à atteindre leur maturité mais sont aujourd’hui incontournables dans la lutte contre le changement climatique.

En somme, le marché des crédits biodiversité, bien qu’encore à ses débuts, affiche une croissance rapide et une évolution structurée. Il devient de plus en plus clair que ces crédits joueront un rôle central dans le financement des initiatives de préservation de la biodiversité, tout en offrant aux entreprises une opportunité de contribuer activement à la protection de la nature.

Les acteurs et les moteurs de la demande

Qui achète des crédits biodiversité ?

Les crédits biodiversité attirent une diversité d’acteurs, principalement issus du secteur privé. Parmi les acheteurs les plus actifs, on retrouve les grandes entreprises multinationales, qui cherchent à améliorer leur image de marque et à répondre aux attentes croissantes en matière de responsabilité environnementale. Ces entreprises évoluent dans des secteurs très exposés aux risques liés à la biodiversité, comme l’agroalimentaire, la mode, ou encore les technologies.

Les PME (petites et moyennes entreprises) commencent elles aussi à s’intéresser aux crédits biodiversité, en particulier celles qui cherchent à intégrer des pratiques durables dans leur modèle d’affaires. De plus, les institutions financières montrent un intérêt croissant, car elles reconnaissent la nécessité de gérer les risques environnementaux au sein de leurs portefeuilles d’investissements.

Enfin, bien que moins nombreux, certains philanthropes, gouvernements et particuliers s’impliquent également, souvent motivés par la volonté de soutenir directement des projets locaux ou spécifiques à certaines régions.

Motivations et objectifs des acheteurs

Plusieurs facteurs motivent l’achat de crédits biodiversité. L’une des principales raisons est le marketing et l’amélioration de l’image de marque. Pour les entreprises, investir dans des crédits biodiversité permet de démontrer leur engagement en faveur de l’environnement, répondant ainsi aux attentes des consommateurs, des investisseurs et des parties prenantes. Cette stratégie est particulièrement attractive pour les marques cherchant à se distinguer dans un marché de plus en plus compétitif où la durabilité devient un critère clé de différenciation.

Un autre moteur essentiel est la gestion des risques liés à la biodiversité. Les entreprises, en particulier dans les secteurs dépendant des ressources naturelles, commencent à reconnaître les menaces que la dégradation de la nature fait peser sur leurs activités. En investissant dans des crédits biodiversité, elles peuvent atténuer ces risques, notamment ceux liés à la transition écologique, aux perturbations physiques (comme la déforestation ou la perte de biodiversité) ou encore aux risques systémiques affectant l’ensemble de l’économie.

De plus en plus, les acheteurs de crédits biodiversité cherchent également à renforcer la résilience de leurs chaînes d’approvisionnement. Par exemple, une entreprise agroalimentaire pourrait investir dans des projets de restauration d’écosystèmes proches de ses sites de production afin de préserver la qualité des sols ou la disponibilité en eau, contribuant ainsi à la pérennité de ses activités à long terme.

Exemples d’utilisation et enjeux géographiques

Il est également intéressant de noter que les acheteurs tendent à privilégier des projets géographiquement proches de leurs activités ou de leurs zones d’approvisionnement. Cette proximité géographique renforce la cohérence entre leurs investissements et les risques auxquels ils sont confrontés localement. Les entreprises européennes sont particulièrement actives sur ce marché, ce qui s’explique en partie par des réglementations plus strictes et une sensibilité accrue aux questions environnementales sur ce continent.

L’une des tendances observées est que les entreprises ne se contentent plus de compenser leurs impacts négatifs mais cherchent à démontrer une contribution nette positive à la nature. Cela se traduit par des revendications de « contribution » plutôt que de « compensation », reflétant un changement d’approche vers des actions véritablement régénératrices.

Ainsi, que ce soit pour des raisons d’image de marque, de gestion des risques ou de résilience, les crédits biodiversité offrent aux entreprises et aux institutions financières une opportunité de s’engager concrètement en faveur de la biodiversité, tout en protégeant leurs propres intérêts économiques.

Défis et opportunités pour un marché durable

L’intégrité des projets de crédits biodiversité

Pour assurer le succès à long terme des marchés volontaires de crédits biodiversité, l’intégrité des projets est essentielle. Il ne suffit pas de financer des actions de préservation ou de restauration ; ces projets doivent être transparents, vérifiables et fondés sur des résultats mesurables. Ainsi, l’une des principales conditions pour crédibiliser ce marché est la mise en place de mécanismes de vérification indépendante. Actuellement, tous les schémas de crédits biodiversité incluent ou prévoient une vérification par des tiers, garantissant que les résultats environnementaux revendiqués correspondent à des actions concrètes et tangibles.

Cette approche d’intégrité est cruciale pour éviter le greenwashing, c’est-à-dire l’utilisation des crédits biodiversité à des fins de marketing sans véritable impact environnemental. L’intégrité des projets permet de renforcer la confiance des acheteurs et de s’assurer que les crédits biodiversité ne sont pas simplement des outils de communication, mais bien des instruments contribuant activement à la régénération des écosystèmes.

Le rôle clé des peuples autochtones et des communautés locales

Un autre élément fondamental pour le développement durable de ces marchés est l’implication des peuples autochtones (IPs) et des communautés locales (LCs). Ces populations, souvent les premiers gardiens des écosystèmes, jouent un rôle central dans la réussite des projets de biodiversité. En effet, 75 % des projets actuels intègrent à divers niveaux les IPs et LCs, que ce soit par leur participation directe à la mise en œuvre, via des modèles de gestion partagée ou encore à travers des mécanismes de partage des bénéfices.

Dans certains cas, la participation de ces communautés a permis d’obtenir des primes sur le prix des crédits, reflétant la reconnaissance de leur savoir traditionnel et de leur rôle essentiel dans la gestion durable des ressources naturelles. Cependant, bien que la participation des IPs et LCs soit déjà importante, il reste encore des marges d’amélioration. La co-propriété des projets ou la direction des initiatives par ces communautés restent des objectifs à atteindre pour de nombreux projets.

L’intégration des IPs et LCs ne se limite pas à une simple reconnaissance symbolique ; elle doit être vue comme une opportunité d’améliorer les résultats des projets de biodiversité tout en respectant les droits des populations locales. Cette approche collaborative renforce la durabilité à long terme des initiatives, car elle s’appuie sur des savoirs ancestraux et des pratiques de gestion environnementale éprouvées.

Évolution des écosystèmes couverts par ces projets

Bien que les projets de crédits biodiversité se concentrent principalement sur les écosystèmes terrestres, on observe une expansion vers d’autres types d’environnements. Ainsi, plus de la moitié des projets soutiennent désormais des actions dans les écosystèmes côtiers et d’eau douce, tandis que les projets dans les écosystèmes marins, bien qu’encore minoritaires, se développent progressivement.

Cette évolution est particulièrement intéressante, car elle reflète la diversité des défis environnementaux auxquels nous sommes confrontés. La préservation des écosystèmes marins et côtiers, par exemple, est cruciale dans la lutte contre le changement climatique, la protection de la biodiversité et la sécurité alimentaire des communautés côtières. En élargissant leur champ d’action à ces écosystèmes, les marchés de crédits biodiversité maximisent leur impact global et participent à la sauvegarde d’une plus grande diversité d’habitats naturels.

Opportunités pour les entreprises et les investisseurs

La croissance de ce marché présente également des opportunités pour les entreprises et les investisseurs. En effet, au-delà de la dimension environnementale, les crédits biodiversité peuvent devenir une nouvelle classe d’actifs financiers. Pour les entreprises, investir dans ces crédits permet de non seulement répondre à des exigences environnementales croissantes, mais aussi de se positionner en tant que leaders de la durabilité, améliorant ainsi leur réputation et attirant des clients sensibles à ces enjeux.

Les investisseurs, quant à eux, voient dans les crédits biodiversité une opportunité d’allier impact positif et rendement financier. Alors que les risques liés à la dégradation des écosystèmes deviennent plus évidents, ces crédits pourraient devenir des instruments financiers précieux pour les fonds cherchant à s’aligner avec des objectifs environnementaux et sociaux. La demande croissante pour des produits financiers durables pourrait renforcer encore davantage l’intérêt pour ces nouveaux types d’actifs.

En résumé, si les défis d’intégrité et de participation des communautés locales doivent être relevés, le marché des crédits biodiversité offre des opportunités considérables pour les entreprises et les investisseurs désireux de s’engager dans la protection de la nature tout en saisissant des opportunités économiques durables.

Les perspectives d’avenir pour les crédits biodiversité

Tendances à venir sur le marché

Le marché des crédits biodiversité est en pleine expansion et les tendances à venir montrent un avenir prometteur. Au cours des cinq prochaines années, les projections indiquent une augmentation significative du volume de crédits échangés, dépassant dans certains cas les 100 000 unités vendues par projet. Ce développement s’inscrit dans un contexte où les entreprises et les gouvernements cherchent à renforcer leurs actions en faveur de la biodiversité, en réponse aux objectifs mondiaux tels que le Kunming-Montreal Global Biodiversity Framework, qui fixe des cibles ambitieuses pour la restauration et la protection des écosystèmes d’ici 2030.

Les entreprises, en particulier, sont de plus en plus pressées de montrer des résultats concrets dans la gestion de leurs impacts environnementaux. La demande pour des crédits biodiversité devrait donc continuer à croître, poussée par une réglementation de plus en plus stricte, notamment en Europe, et par la pression des parties prenantes, qu’il s’agisse des consommateurs, des investisseurs ou des régulateurs.

Vers une nouvelle classe d’actifs ?

Un des aspects les plus intéressants du développement de ce marché est la possibilité que les crédits biodiversité deviennent une véritable classe d’actifs financiers à part entière. Si les crédits carbone sont déjà utilisés dans les stratégies d’investissement responsable, les crédits biodiversité, encore à leurs débuts, pourraient suivre une trajectoire similaire. Ils offrent aux investisseurs un moyen concret de soutenir des projets environnementaux tout en diversifiant leurs portefeuilles.

Les crédits biodiversité ont la capacité d’attirer un large éventail d’investisseurs, des fonds spécialisés dans l’investissement durable aux entreprises cherchant à mitiger leurs risques liés à la nature. Pour ces derniers, investir dans la biodiversité permet non seulement de répondre aux attentes réglementaires, mais aussi de sécuriser leurs approvisionnements et de renforcer leur résilience face aux défis environnementaux.

En devenant un actif financier, les crédits biodiversité pourraient également ouvrir la voie à la création de marchés secondaires où ces crédits pourraient être échangés, augmentant ainsi leur liquidité et leur attractivité pour des investisseurs institutionnels.

Les défis à surmonter pour éviter le greenwashing

Cependant, pour que ces crédits biodiversité soient perçus comme des actifs crédibles et fiables, il est essentiel de surmonter certains défis. Le principal d’entre eux est le risque de greenwashing, c’est-à-dire la tentation pour certaines entreprises d’utiliser ces crédits pour améliorer artificiellement leur image environnementale sans générer de réels impacts positifs sur la biodiversité.

Pour éviter ce piège, il est impératif de renforcer les standards d’intégrité et de transparence sur ce marché. Cela passe par des systèmes de vérification rigoureux et indépendants, des indicateurs de performance clairs et mesurables, ainsi que des cadres réglementaires stricts pour encadrer l’utilisation des crédits biodiversité. Les entreprises doivent également adopter une approche plus globale de la gestion de leurs impacts sur la nature, en intégrant les crédits biodiversité dans des stratégies de durabilité plus larges, plutôt que de les utiliser comme des outils de compensation superficielle.

Enfin, la question des revendications faites par les entreprises sur l’utilisation de ces crédits doit être clarifiée. De nombreuses entreprises optent désormais pour des « contributions » plutôt que des « compensations », reconnaissant que leur achat de crédits biodiversité ne devrait pas simplement neutraliser leurs impacts, mais plutôt contribuer de manière nette à la préservation et à la régénération des écosystèmes.

Vers une gouvernance et une régulation renforcées

Pour garantir l’avenir de ce marché, il sera essentiel de mettre en place une gouvernance solide et une régulation claire. Cela implique la création de normes communes au niveau international, afin d’assurer la cohérence entre les différents acteurs et de favoriser la confiance dans ces nouveaux instruments financiers. Les institutions internationales, les gouvernements nationaux, et les organisations non gouvernementales devront travailler ensemble pour définir les règles du jeu et s’assurer que ces marchés bénéficient véritablement à la biodiversité et aux communautés locales.

Les régulations à venir devront également s’assurer que les projets financés par les crédits biodiversité ne servent pas uniquement les intérêts économiques des acheteurs, mais qu’ils respectent les droits des peuples autochtones et des communautés locales, qui jouent un rôle crucial dans la préservation des écosystèmes.

Conclusion

Les marchés volontaires des crédits biodiversité représentent effectivement une solution innovante pour répondre à la crise environnementale mondiale. En permettant de financer des projets concrets de préservation et de restauration des écosystèmes, ces crédits jouent un rôle central dans la transition vers un monde plus durable et résilient. Bien que le marché soit encore en pleine croissance, il est évident que son potentiel est immense, tant pour les entreprises souhaitant atténuer leurs risques environnementaux que pour les investisseurs cherchant à diversifier leurs portefeuilles tout en ayant un impact positif sur la nature.

Cependant, pour que ce marché atteigne son plein potentiel, il est impératif d’assurer une intégrité exemplaire des projets, une participation active des peuples autochtones et des communautés locales, et de mettre en place des cadres de régulation solides. Ces mesures permettront d’éviter les dérives liées au greenwashing et de garantir que les crédits biodiversité contribuent réellement à la protection de notre planète.

Si vous êtes une entreprise ou un investisseur désireux de vous engager dans une démarche de performance durable et de comprendre comment les crédits biodiversité peuvent renforcer votre stratégie environnementale, je peux vous accompagner dans cette transition. En tant que consultant spécialisé en performance durable, je vous aide à intégrer des solutions concrètes et adaptées à vos enjeux, tout en maximisant votre impact positif sur la biodiversité.

Contactez-moi dès maintenant pour explorer ensemble les opportunités que les crédits biodiversité peuvent offrir à votre organisation, et élaborons une stratégie qui conjugue durabilité, performance et résilience à long terme.

Les sources pour aller plus loin :

https://pollinationgroup.com/wp-content/uploads/2024/09/BiodiversityCreditMarkets_2024-FINAL.pdf